Humeurs (Février 2017 - 2)
D’UNE RIVE …
Justice !
L’affaire de Théo a mis en évidence les dérives en matière de contrôles et de violences policières (et parfois même les dénis de justice) et les graves discriminations selon l’origine des personnes contrôlées. Cela est d’autant plus flagrant dès lors qu’il s’agit de jeunes d’origine arabe et/ou africaine et de personnes vivants dans les quartiers populaires. Des dérives de plus en plus constatées sur le terrain et ce depuis des années maintenant au point qu’il devient légitime de se demander si ce n’est pas là le fonctionnement somme toute « normal » d’un système qui gère les questions de (et dans) ces quartiers et des personnes qui vivent comme on gérait naguère les populations « indigènes » dans les colonies. L’affaire Théo a joué comme révélateur de ces dérives et de plus en plus de gens commencent, enfin, à se rendre compte d’une réalité que les « enquêtes » officielles et un certain corporatisme avaient tendance à étouffer. Les mobilisations presque quotidiennes contre ces dérives montrent que quelque chose est en train de bouger dans l’opinion. Certes on ne peut accepter qu’en réponse à cette violence policière certains manifestants en arrivent à utiliser, à leur tour, la violence, les destructions et les dégradations des édifices publics ou privés. Mais attention à ne pas faire comme « l’idiot qui s’obstine à regarder le doigt quand le sage montre la lune ». Aussi condamnable qu’elle soit n’est-elle pas avant tout le signe que des pans entiers de la société – et dans les quartiers populaires plus qu’ailleurs – sont en train de perdre confiance dans les institutions de la république, de la police évidemment puisque considérée comme un quasi corps étranger et hostile, mais également de l’institution judiciaire ? Adama Traoré, Ali Ziri, Abdelakim Ajimi, Wissam El Yamni, Amine Bentounsi, Lahoucine Ait Omghar, Nabil Matboul, Youcef Mahdi, Bertrand Nzabonayo, Abdoulaye Camara, Amadou Koume, Remy Fraisse, Pierre Cayet, Mehdi Bouhouta ... Et la liste est malheureusement bien plus longue. Voilà pourquoi la justice doit montrer l’exemple.
… A L’AUTRE
Marchandages !
« Les autorités tunisiennes sont la cible de pressions intolérables de la part de l'Italie et de l'Allemagne. En l'espace d'une semaine, elles ont dû opposer une fin de non recevoir aux responsables allemands puis italiens qui envisageraient de renvoyer vers la Tunisie des personnes migrantes et réfugiées. Les questions de sécurité intérieure semblent constituer la pierre angulaire de termes de coopération imposés à la Tunisie sur un terrain qui, pourtant, en est totalement distinct : le droit d'asile ». Outre l’atteinte au droit d’asile (par l'usage du fameux concept de pays « sûr ») voilà également - au prétexte de lutte contre le terrorisme – un inadmissible marchandage (aide économique en échange de réadmission) que cherchent à imposer les pays européens et que critiquent, à raison, les ONG et associations de la société civile en Tunisie comme en Europe.
Baddel52 !
« Depuis 1992, plus de 120 000 citoyens et leurs familles ont vu leur vie basculer à cause d’un joint ». Plus de 1/3 des détenus dans les prisons tunisiennes le sont pour consommation de cannabis. Et cela en vertu de l’art.52 du code pénal qui criminalise systématiquement la consommation de cannabis. Et pourtant chacun sait que depuis la mise en application de cette loi en 1992, loin de diminuer, le nombre de consommateurs n’a cessé d’augmenter (entre 2000 et 2016, le nombre de procès est passé de 732 à 5.744). Sans oublier le taux élevé de récidives. Cette politique de criminalisation et de répression a fait la démonstration de son échec et qu’il convient de revoir et d’admettre que c’est avant tout une question de santé publique, de prévention et d'accompagnement. Non seulement la prison ne résout rien mais encore elle aggrave la situation et de ces jeunes et des prisons et de la société. De plus en plus de citoyen(ne)s, d’associations mais également de gouvernants semblent finalement prendre conscience du problème et l’on s’oriente vers une modification du texte de loi à défaut de son abrogation pure et simple. #Baddel52
M.D.