2016 : CHRONIQUE DES ASSOCIATIONS DE TUNISIEN(NE)S EN FRANCE (4)
2016 : Chronique des associations de tunisien(ne)s en France (4)
Arts, Cultures, Débats, Réflexions …
En 2016 les arts et la culture sont évidemment présents dans les activités des associations de l’immigration et des Tunisien(ne)s en France. Et le cinéma y occupe une place de choix en écho avec le renouveau et la dynamique de cet art en Tunisie après la révolution.
Les débats et la réflexion également ont souvent été et depuis fort longtemps maintenant des moments importants dans la vie militante de l’immigration et des Tunisien(ne)s à l’étranger et cela va certainement se poursuivre à l’avenir. Aussi loin que l’on remonte dans l’histoire de l’immigration et des associations l’action culturelle a toujours accompagné et constitué une dimension quasi inséparable de l’agitation militante[1]. En 2016 une vingtaine de débats au moins ont été ainsi organisés par les associations de Tunisiens en France (la plupart ont eu lieu à Paris certes mais également dans d’autres villes et régions : Antony, Aubervilliers, Monaco, Noisiel, Rennes, Toulouse et Villeneuve d’Asq). Des conférence-débats et des réflexions avec pour thème principal et presque unique : la Tunisie après la révolution.
A signaler l’heureuse initiative de l’association C3C commencée en 2012 et qui inaugure en 2016 la 2ème édition du Printemps Culturel Tunisien à Paris. Et pour 2017, le Printemps Culturel Tunisien fera peau neuve et se déroulera sur les deux rives de la Méditerranée avec un nouveau nom : le Printemps Culturel Méditerranéen.
2016 a également été marqué par la disparition du grand poète Mohamed Sghair Ouled Ahmed, l'enfant rebelle de la poésie tunisienne auquel les associations et les Tunisien(ne)s ont rendu un hommage unanime. « Ouled Ahmed est parti. Toute sa vie il a nargué la maladie, la morosité, la mort. (…) Nous perdons un frère, un ami et un compagnon de route des tunisiens de France lui qui avait toujours répondu présent à nos invitations et à nos sollicitations ». Et en effet Mohamed Sghair Ouled Ahmed était un véritable compagnon de route des combats de l’immigration en France et ce depuis longtemps (déjà invité à Paris en 1989 puis en 1994 lors du 20ème anniversaire de la FTCR ex-UTIT, et à nouveau en 2014, puis en 2015 à l’occasion de l’AG du CRLDHT et enfin à Lille invité par l’ATNF).
Autre disparition du journaliste-Photographe Brahim Chanchabi (1954-2016), militant culturel et témoin engagé dans toutes les mobilisations de l’immigration avec l’association AIDDA.
Si les espaces et locaux associatifs, ont été, malgré les faibles moyens, les lieux les plus disponibles pour accueillir ces activités culturelles et artistiques (cours d’arabe, de français, iftar ramadan, expo, débats, concerts …), d’autres espaces institutionnels, plus appropriés et mieux équipés, ont joué un rôle important notamment à Paris tels l’Institut des Cultures d’islam (ICI), l’IMA (institut du Monde Arabe) ou encore la Fondation de la Maison de Tunisie (FMT). De même il faut signaler que ces dernières années il y a eu la transformation des locaux appartenant à l’Etat Tunisien (anciennement utilisés par le RCD) en des structures d’accueil et d’animation ouvertes aux associations et aux Tunisien(ne)s et devenues « Maison du Tunisien » (Dar Ettounsi) et dans lesquels se sont déroulées un certain nombre d’activités associatives et ou en liens avec les consulats. Elles sont sous la tutelle d’un organisme officiel l’OTE (office des Tunisiens à l’étranger)[2]. Ces espaces et tout particulièrement les espaces associatifs (comme ceux de la FTCR, de l’ATF … à Paris - mais c’est également le cas partout en France - où les associations disposent de locaux) et/ou para-associatifs (à l’exemple de celui de la rue de Trétaigne ou encore le CICP à Paris) sont incontestablement des lieux-ressources et des lieux-mémoires non seulement pour l’immigration tunisienne mais, et cela en a toujours été ainsi concernant les locaux associatifs, pour toute les immigrations. Les historiens qui travaillent sur l’immigration en savent quelque chose lesquels n’ont d’ailleurs pas fini, pour leurs travaux de recherche, de puiser dans ces lieux[3].
[1] Que de noms ont en effet accompagné les mobilisations immigrées dans les années 1970 et 1980 tels les regrettés Hédi Guella, Mouldi Zalila, Mohamed SghaIr Ouled Ahmed, mais également les chanteurs Chaker Limam, Ahmed Ben Dhiab, Mohamed Bhar, Amel Mathlouthi, Nayssatou, l’écrivain Tahar Békri, les poètes Kamel Bouajila, Kamel Ghali, le groupe « le théâtre arabe dans l’immigration », les nombreux cinéastes Nacer Ktari, Mahmoud Jemni, Taïb Louhichi …
[2] Il est évident que ces structures « Dar Etounssi » étant des organismes sous tutelle de l’Etat tunisien par le biais de l’OTE organisent des activités régulières. C’est la raison pour laquelle ces activités ne sont pas systématiquement mentionnées dans ce texte qui s’attache avant tout à rapporter les initiatives des associations autonomes. D’autant que ces dernières avaient demandé après la révolution et notamment lors des « Assises de l’immigration » en mai 2011 à ce que ces locaux (utilisés avant 2011 par les officines du RCD) soient transformés en Maison des associations et que soit ouvert une discussion sur leur gestion. C’est sous la houlette de H Jaziri secrétaire d’Etat aux tunisiens à l’étranger sous la Troïka que ces espaces Dar Etounssi se sont généralisés. Il en existe 5 en France (Aubervilliers, Lyon, Grenoble, Marseille et Nice).
[3] Il en a été ainsi par exemple du 115 Bd St-Michel à Paris pour l’AEMNA puis pour l’UGET et les autres organisations d’étudiants maghrébins ; du 35, rue Stephenson à la Goutte d’Or pour le MTA (Mouvement des travailleurs arabes) ; du 46, rue de Montreuil à Paris 11è pour la MTI (Maison des travailleurs immigrés), le CAIF (conseil des associations d’immigrés en France), puis le MIB (Mouvement de l’immigration et des Banlieues) ; de la rue Serpente pour les associations marocaines (AMF) ; de la salle Saint-Bruno à la Goutte d’or à Paris, du Relais Ménilmontant, du CICP …. Et d’autres encore le souvent situés dans les quartiers populaires du nord-est parisien (Belleville, Ménilmontant, Charonne, Barbès…) lesquels se trouvent être des lieux chargés d’une histoire qui remonte à la Commune de Paris en 1871 et même avant autant des Révolutions de 1789, 1830, 1848 (cf. « L’immigration de A à Z »).